Le président chinois Xi Jinping, le président russe Vladimir Poutine et le Premier ministre indien Narendra Modi en marge du sommet de Tianjin (AP)

Deux tapis rouges. Un en Alaska, l'autre à Tianjin. Le premier a été installé par l'armée américaine d'une manière que certains ont qualifiée d'« humiliante ».

Le souhait du président russe Vladimir Poutine se réalise mieux qu'il ne l'imaginait. Deux images à des milliers de kilomètres résument la situation. L'isolement politique de la Russie devient progressivement un souvenir.

Paul Sonne du New York Times a fait une comparaison frappante. Lorsque Poutine a assisté au sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai il y a trois ans, la Chine s'inquiétait de l'invasion russe de l'Ukraine, tandis que le Premier ministre indien Narendra Modi soulignait que l'époque actuelle « n'est pas une époque de guerre ». Le dernier sommet de Tianjin était différent.

Sur la photo, Poutine brise l'isolement. Cependant, la politique est plus qu'une image. Sortir de l'isolement n'est pas une fin en soi, mais un moyen d'atteindre un objectif. Plusieurs objectifs russes restent à concrétiser. Lors du sommet de Tianjin, Poutine a déclaré dans une interview que « le militarisme japonais est ravivé sous prétexte de menaces russes ou chinoises fictives, tandis que des mesures sont prises en Europe, notamment en Allemagne, pour réarmer le continent, avec peu d'attention aux parallèles historiques ».

Cependant, alors que les commentaires de Poutine sur l'Allemagne figuraient dans le texte complet de l'interview, ils ont été supprimés des principaux rapports d'information en anglais qui l'accompagnaient. Selon The Times, cela s'explique par l'intérêt de la Chine à développer ses relations avec l'Europe et l'Allemagne. Ainsi, il n'y a pas d'alignement des vues entre la Chine et la Russie concernant les « menaces » étrangères. Pékin considère l'Europe comme une opportunité, tandis que Moscou la perçoit comme une menace.

Les rires de Poutine et Modi le deuxième jour du sommet de Tianjin ont attiré l'attention de la presse. Mais derrière ce rire se cache une inquiétude potentielle. L'Inde a été soumise à une taxe douanière américaine de 25 % pour l'achat de pétrole russe. La question clé à Moscou est de savoir dans quelle mesure l'Inde peut résister à la pression américaine avant de réduire ses achats. Selon Reuters, New Delhi augmentera ses importations russes le mois prochain d'environ 10 à 20 %. À long terme, la situation reste floue, et pas seulement dans le secteur de l'énergie.

En octobre 2024, un rapport de l'institut Chatham House a indiqué que la relation entre l'Inde et la Russie connaît un « déclin maîtrisé ». Entre 2009 et 2013, la Russie représentait 76 % des importations militaires de l'Inde. Entre 2019 et 2023, ces importations ont chuté à 36 %. La guerre en Ukraine a accéléré cette tendance.

Même en Alaska, où les propos de Trump semblaient prometteurs, Poutine n'a pas récolté de gains concrets. La nouvelle administration est ouverte à écouter les préoccupations de la Russie et à en tenir compte, mais cette ouverture ne s'est pas traduite par une pression américaine importante sur l'Ukraine pour qu'elle abandonne l'ensemble du Donbass. Parallèlement, Trump tend à soutenir un « filet de sécurité » pour les forces européennes garantes qui pourraient être déployées en Ukraine après la fin de la guerre, ce qui dérange le Kremlin. Sans ce filet de sécurité, la chance de déploiement de forces européennes en Ukraine diminue. La Russie a réitéré son rejet de cette proposition.

En ce sens, une question fondamentale reste posée aux décideurs de Moscou :

À quoi sert la sortie de la Russie de l'isolement si elle peine toujours à atteindre ses objectifs minimaux en Ukraine ?