Les dirigeants et cadres des Frères musulmans ont présenté plusieurs initiatives au cours des trois dernières années appelant à la réconciliation avec le régime au pouvoir au Caire, dans un silence total des autorités égyptiennes.

Selon des analystes et des sources proches des cadres des Frères musulmans réfugiés à l'étranger, interrogés par "Annahar", ces initiatives sont une réaction au resserrement de l'étau sur les membres du groupe, considérés comme une "carte brûlée" et un "échec" aux yeux des pays de la diaspora qui les ont accueillis après la chute de leur régime suite aux manifestations massives soutenues par l'armée le 30 juin 2013.

Le rythme des efforts de réconciliation des cadres du groupe a nettement augmenté ces dernières semaines, le dernier en date étant une déclaration diffusée par le leader des Frères musulmans Mohamed Emad Saber sur sa page "X". Cette déclaration est intervenue quelques jours après une vidéo du youtubeur Ali Hussein Mahdi, affilié aux Frères musulmans, qui a raconté son expérience après son retour en Égypte et l'obtention d'une grâce présidentielle peu de temps après avoir été emprisonné pour une peine de prison à vie.

Parallèlement aux initiatives successives, des membres affiliés au groupe ont courtisé l'État égyptien avec des phrases totalement différentes du discours adopté par les Frères musulmans pendant plus de dix ans.

Solution ou dialogue ?

L'expert des mouvements islamiques, le Dr Amr Abdel Moneim, estime que les Frères musulmans cherchent une solution, pas un dialogue comme ils le prétendent, juste pour sortir de leurs crises et problèmes.

Abdel Moneim s'interroge dans son entretien avec "Annahar" : "Pourquoi la proposition est-elle renouvelée à chaque période avec des termes différents et changeants : réconciliations, règlements, révisions, acquittements, et enfin dialogue ?" Il ajoute : "Nous devons regarder le phénomène de l'islam politique et les composantes de sa continuité dans le monde arabe, notamment avec les répercussions récentes des événements du déluge d'Al-Aqsa et l'arrivée d'Ahmed Al-Shar'a au pouvoir en Syrie, qui a un passé djihadiste armé."

Il souligne que "la plupart des groupes frères musulmans et djihadistes à l'étranger voient le renversement de l'État, partageant les rôles entre 'pacifique' et soulèvement révolutionnaire armé, donc ils veulent une solution, pas un dialogue, mais à quelles conditions ? Le vaincu n'impose jamais ses conditions."

Il ajoute que les accords politiques du passé sont terminés, mais il estime que certains "réviseurs" sont sincères, c'est pourquoi ils subissent des attaques féroces des plateformes médiatiques du groupe et leur sincérité est remise en question.

Pas de réconciliation

Pour sa part, le Dr Fathi Al-Sharqawi, professeur de psychologie politique, fait la distinction entre réconciliation officielle et populaire.

Al-Sharqawi déclare à "Annahar" : "La réconciliation officielle a des objectifs que seuls les décideurs dans les cercles du pouvoir peuvent connaître, donc elle ne peut pas être prédite."

Au niveau populaire, il estime qu'"il n'y a pas de réconciliation avec le sang", ajoutant : "Je ne pense pas que les Égyptiens acceptent la réconciliation avec les Frères musulmans qui ont essayé de terroriser le peuple et d'utiliser la force et les menaces... Les Égyptiens ne peuvent pas accepter la réconciliation avec eux."