« L’imaginaire ne peut être colonisé », c’est par cette phrase éloquente et pleine de défi que l’écrivain franco-marocain Rachid Benzine ouvre son propos sur son nouveau roman, qui constitue la seule œuvre littéraire sur la bande de Gaza dans la saison littéraire française actuelle.
Dans son ouvrage intitulé « L’Homme qui lisait des livres » (L'Homme qui lisait des livres), il raconte l’histoire d’un libraire à Gaza, un homme né en 1948, année de la Nakba, et passionné par la culture française, dont la voix devient une fenêtre à travers laquelle on aperçoit une blessure qui ne guérit pas.
Cette œuvre a suscité l’intérêt d’éditeurs étrangers avant même sa sortie, soulevant une question urgente sur le manque de productions littéraires mondiales qui plongent au cœur de l’expérience humaine à Gaza.
Quatorze traductions du roman sont prévues au Royaume-Uni, en Espagne, en Italie et dans d’autres pays européens, ce que Benzine considère comme un grand succès en soi, car cela signifie que la parole de « Nabil », le libraire de Gaza, commence à se répandre et à briser les murs du silence.
Benzine s’interroge sur ce que signifie être « un homme bon en temps de guerre », surtout dans le contexte tragique de Gaza. Face au flot quotidien d’images horribles qui finissent par occulter la véritable Gaza et la rendent invisible, le besoin urgent de mots se fait sentir.
Il poursuit : « On nous dit par exemple : 63 personnes sont mortes aujourd’hui à Gaza. À force de s’habituer à ces chiffres, un phénomène de déshumanisation s’installe. » D’où la nécessité de recourir aux mots, non pas aux mots de l’analyse politique ou des études stratégiques, mais à des mots qui plongent dans « l’intimité » et restituent le visage humain des victimes.
Benzine a choisi pour son personnage principal, Nabil, d’être le fils d’un père chrétien et d’une mère musulmane. Ce choix n’était pas arbitraire, mais visait à mettre en lumière la situation palestinienne complexe, face à ceux qui cherchent toujours la simplification et la rupture idéologique.
L’écrivain ne voulait pas réduire les Palestiniens à une identité musulmane uniquement, ni réduire ce qui se passe à Gaza à une simple guerre entre Arabes et Juifs. Benzine déclare : « Il y a des chrétiens, il y a ce mélange... Je voulais que ce personnage se situe à l’intersection de différentes traditions, capable de mêler une sourate du Coran et des psaumes de la Bible. »
Nabil accomplit un acte que l’écrivain considère comme radical et révolutionnaire : la lecture. Toutes les pertes qu’il a subies en tant que Palestinien né en 1948 ne définissent pas entièrement son identité. Comme il le dit à travers son personnage : « Nous sommes tous nés en 1948. »
Nabil est propriétaire d’une librairie, mais il passe son temps à offrir des livres plutôt qu’à les vendre. Cet acte, dans les circonstances que nous vivons et compte tenu de notre relation particulière au temps, devient un acte de désobéissance et de résistance. Benzine s’interroge : que peut faire la littérature ? La réponse est claire et décisive : « Elle ne pourra pas arrêter les bombes, ni redonner vie aux morts, aux enfants, aux femmes. Mais elle peut peut-être préserver le noyau le plus solide de l’humain. »
Nabil aurait pu ressentir de la haine à tout moment, et le monde l’aurait compris après tout ce qu’il a enduré. Mais une chose est constante chez cet homme : il « refuse de déshumaniser les gens ».
Face à la destruction systématique de la bande de Gaza, quel espoir reste-t-il ? Benzine estime qu’il est important d’inscrire ce roman dans un cycle temporel long. Nabil raconte l’histoire de 1948, raconte les réfugiés, raconte la place de l’écriture, son frère, sa mère... Il narre une épopée palestinienne complète.
Le plus grand danger que voit l’écrivain se profiler est le sentiment d’impuissance. « Certains cherchent à nous faire croire que nous ne pouvons rien faire, que ce n’est pas entre nos mains. Alors que c’est le contraire ; chacun de nous doit à un moment donné se lever, manifester, boycotter, aller vers l’humanité. »
Rachid Benzine a dédié ce roman « à tous ceux qui refusent de céder à l’obscurité », car parmi les décombres et la destruction, il y a un homme qui lit. Cela peut sembler tout, mais en même temps, c’est quelque chose d’immense. C’est la preuve irréfutable que « l’imaginaire ne peut être colonisé, et qu’en fin de compte, la liberté de pensée demeure. »
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