Le journal israélien Haaretz, dans un reportage de sa correspondante à Washington Lisa Rozovsky, a déclaré que le Qatar est sorti comme un gagnant clair et majeur de la réunion entre le président américain Donald Trump et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

Malgré toute l’ambiguïté entourant la conférence de presse conjointe et les difficultés fondamentales à mettre en œuvre le plan de Trump pour mettre fin à la guerre à Gaza, le gain politique réalisé par Doha est apparu tangible et remarquable.

Le journal explique que le plan de Trump composé de 21 points pour mettre fin à la guerre a été pratiquement réduit à 20 points après que le point 21 a été appliqué lors de la réunion entre Trump et Netanyahu, et a donc été supprimé de l’annonce de l’accord.

Le Premier ministre israélien a dû présenter des excuses claires au Premier ministre qatari Cheikh Mohammed ben Abdulrahman Al Thani, s’engageant à ce qu’Israël n’attaque plus le territoire qatari. Haaretz décrit cette scène comme un “succès politique sans précédent” pour Doha, qui avait longtemps été accusée par Netanyahu.

Rozovsky ajoute que le président Trump lui-même a joué le rôle de “responsable des relations publiques” du Qatar lors de la conférence de presse, louant abondamment son émir, ce qui était clairement visible sur le visage de Netanyahu qui essayait de cacher sa tension avec un sourire forcé, essuyant la sueur de son front avec un mouchoir en écoutant ces éloges.

Selon le rapport, la réunion a également marqué un tournant dans le discours américain envers Israël. Après deux ans d’utilisation de l’expression “le temps presse” dans le contexte de la souffrance des prisonniers et de leurs familles, la Maison Blanche a envoyé un message implicite à Netanyahu que le temps qui lui était accordé pour poursuivre la guerre à Gaza, avec sa “propagation de la mort et de la destruction”, était révolu.

Cependant, la correspondante note que ce message est venu “en petits caractères” et que ses résultats ne seront clairs que dans les jours et semaines à venir.

Recul

Haaretz souligne que Netanyahu a répété tout au long des deux dernières années que la guerre ne pouvait se terminer que par une “victoire complète” sur le Hamas, y compris sa reddition complète et son désarmement, mais il a été contraint devant Trump et les caméras d’accepter un plan qui n’atteint pas explicitement cet objectif.

Le plan prévoit la possibilité d’un “cadre crédible pour l’autodétermination et l’établissement d’un État palestinien”, bien que Netanyahu ait l’habitude de dire que l’État palestinien est une “récompense pour le Hamas”. Bien que l’annonce conjointe avec Trump devait représenter un point de départ vers la fin de la guerre, de nombreux détails sont restés vagues, ce qui pourrait entraver la mise en œuvre.

Selon le plan, le Hamas doit libérer tous les otages dans les 72 heures suivant l’approbation publique d’Israël, et en retour, le mouvement doit démanteler son infrastructure, y compris les tunnels et les installations de production d’armes, et commencer un “processus de désarmement de Gaza sous la supervision d’observateurs indépendants”.

Cependant, ce processus ne sera pas immédiat et ne sera pas facile à achever, selon le rapport du journal qui estime que “la proposition n’est pas mauvaise pour le Hamas”, car elle lui donne la possibilité de conserver son influence et sa dignité dans la bande même en entrant dans de nouveaux arrangements.

L’article 17 est l’un des points controversés du plan publié par l’administration américaine, apparemment pour embarrasser Netanyahu. Il stipule qu’Israël transférera les “zones exemptes de terrorisme” à une force de stabilisation internationale même si le Hamas rejette le plan.

Cette force devrait inclure des éléments arabes et internationaux et bénéficier d’un soutien consultatif de l’Égypte et de la Jordanie, mais le rapport souligne que de nombreuses questions restent sans réponse, telles que la définition des “zones exemptes de terrorisme”, les limites et les pouvoirs de cette force, et comment la communauté internationale réagira si le Hamas refuse de mettre en œuvre l’accord.

Conflit

Rozovsky s’arrête sur la carte des étapes du retrait israélien de Gaza jointe par la Maison Blanche au plan, où elle considère que la première étape, décrite comme “modeste”, signifie un retrait partiel des zones peuplées, y compris des parties de la ville de Gaza, mais Netanyahu s’est empressé de rassurer ses électeurs qu'”Israël restera dans la majeure partie de la bande”.

La deuxième étape est liée au déploiement de la force de stabilisation internationale, tandis que l’étape finale est reportée jusqu’à la confirmation de “la disparition de la menace terroriste”, une définition vague permettant de reporter indéfiniment le retrait.

Haaretz note que ce que Netanyahu décrit aujourd’hui comme un succès aurait pu être atteint il y a des mois, mais avec une différence fondamentale : à cette époque, il y avait plus d’otages en vie et beaucoup moins de victimes palestiniennes et de destructions à Gaza.

Le journal cite une déclaration de l’envoyé américain Brett McGurk, qui a supervisé les négociations, disant que la proposition actuelle est très proche de ce qui devait être la deuxième phase de l’accord de cessez-le-feu en janvier dernier.

En conclusion, Rozovsky décrit la scène générale lors de la conférence de presse en disant que Trump fait de longues déclarations sur “la paix mondiale au Moyen-Orient”, tandis que Netanyahu se tient à ses côtés, nerveux, essayant de cacher son mécontentement avec un sourire faible. Alors que Trump parlait des Israéliens qui “veulent le retour des otages et la fin de la guerre”, il semblait que le message était parvenu au Premier ministre israélien qu’il ne pouvait plus continuer indéfiniment une guerre qui coûte des dizaines de milliers de vies.

Le journal résume la situation en disant que malgré toutes les contradictions et ambiguïtés, la communauté diplomatique à Washington a vu le résultat clair de la réunion : le Qatar est sorti grand gagnant, ayant obtenu des excuses publiques de Netanyahu et renforcé sa position en tant que partie clé dans tout futur règlement. En revanche, Israël semblait contraint de se conformer à un plan américain qui reconnaît implicitement l’idée d’un État palestinien, même si Netanyahu le rejette verbalement.